Des enfants syriens de retour à l'école à Minbej, en Syrie, le 25 septembre 2016

Des enfants syriens de retour à l'école à Minbej, en Syrie, le 25 septembre 2016

afp.com/Ayham al-Mohammad

Il s'agit pour eux d'une journée exceptionnelle car c'est leur première rentrée des classes normale après avoir vécu deux ans sous la férule du groupe jihadiste.

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"Nous sommes ravis d'être revenus à l'école et nous espérons y venir tous les jours", assure Ghefrane, une fillette de neuf ans avec sa queue de cheval et un pull rose clair.

Ghefrane a retrouvé l'école "Bayram", qui avait été renommée par l'EI "Abdallah Azzam", du nom du fondateur du jihadisme mondial. Les murs autour de l'établissement avaient été peints avec le drapeau noir et blanc des jihadistes.

"L'EI ne nous laissait pas aller à l'école (...) Nos professeurs et leur enseignement nous manquaient tout comme nos livres de classe", confie la fillette à l'AFP.

Le groupe ultraradical s'était emparé de Minbej début 2014 et avait imposé son interprétation radicale de l'islam, bannissant l'enseignement traditionnel dans les écoles de la région et donnant des cours de religion dans quelques unes d'entre elles.

Les jihadistes avaient fermé des centaines d'écoles dans la ville et ses environs en novembre 2014, laissant sans instruction 78.000 enfants durant deux ans, affirme le coordonnateur du département de l'éducation dans la ville, Hassan Haroun.

- Quelque 200 écoles rouvertes -

Mais en août dernier, des combattants kurdes et arabes regroupés au sein les Forces démocratiques syriennes (FDS) et soutenus par les États-Unis avaient repris la ville.

Aussitôt, Haroun et son équipe s'étaient mis au travail, dressant une liste des écoles pouvant accueillir les élèves pour la rentrée.

Sur 390 établissements à Minbej et ses environs, 192 ont rouvert cette année et 59 sont encore en travaux.

Le reste des écoles, dans les environs de Minbej, sont toujours sous contrôle de l'EI, affirme M. Haroun.

"Le début de l'année scolaire fut réellement fantastique (...) Tout le monde était très excité", confie M. Haroun en souriant.

Il garde de mauvais souvenirs du règne de l'EI, affirmant que six de ses collègues ont été décapités sous l'accusation de "collaboration avec le régime".

A l'école Bayram, pendant la récréation, les enfants courent dans la cour avec un ballon de football dégonflé ou s'amusent avec des cailloux.

A l'intérieur, une vingtaine d'écoliers gigotent sur leurs bancs pendant que deux jeunes enseignants leur expliquent qu'ils vont devoir rattraper en dix mois les deux ans perdus.

Rayonnante, le petite Rana est assise au premier rang de sa classe, avec une petite pile de livres sur son bureau.

- Rattraper le temps perdu -

"Quand les hommes de Daech (acronyme arabe de l'EI) étaient ici, je n'ai pas étudié. J'ai été à l'école que deux ou trois jours puis j'ai arrêté", dit la fillette de neuf ans.

"J'avais vraiment le coeur brisé quand je voyais qu'ils utilisaient nos écoles pour stocker des mines", ajoute-t-elle.

La fillette a bien l'intention de rattraper le temps perdu car son ambition est intacte. "J'espère devenir médecin pour aider les gens", lance-t-elle.

Tarek al-Cheikh, enseignant à l'école Bayram, confie combien il était triste de voir les écoles fermées du temps de l'EI.

"Le plus pénible était de voir des enfants essayant d'apprendre un métier ou jouant au ballon dans la rue car il n'avait rien d'autre à faire", explique cet instituteur.

Si les enseignants sont ravis de retourner dans leur classe, ils savent qu'ils vont avoir beaucoup à faire. Les livres et le matériel scolaires sont rares et les enfants sont tellement en retard que des écoliers d'âges différents sont regroupés dans une même classe.

"Comme vous pouvez le voir, certains étudiants se rappellent à peine l'alphabet", souligne Hassan Othman, une enseignant d'une vingtaine d'années.

"Quand ils étaient chez eux, du temps de l'EI, les enseignants avaient le sentiment que tout ce qu'ils avaient enseigné (...) avait été oublié", ajoute-t-il.

"Alors vous pouvez imaginer ce que nous avons ressenti quand (les écoles ont rouvert). Il n'y a rien de plus beau".

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