Vincent Lindon ou la fragilité de l'homme contemporain

L'acteur français Vincent Lindon, prix d'interprétation masculine à Cannes, le 24 mai 2015
L'acteur français Vincent Lindon, prix d'interprétation masculine à Cannes, le 24 mai 2015 © AFP - VALERY HACHE

Temps de lecture : 3 min

Talentueux, grande gueule et sans détours, Vincent Lindon, qui a obtenu le prix d'interprétation à Cannes pour son rôle dans "La loi du marché" de Stéphane Brizé, incarne au cinéma l'homme contemporain à la fragilité manifeste.

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Dans "La loi du marché", film cinglant sur la brutalité du monde du travail, il interprète avec justesse Thierry, un chômeur de longue durée, père d'un enfant handicapé, qui va d'entretiens d'embauche humiliants en stages inutiles.

Après avoir été embauché comme vigile, il va se retrouver face à un dilemme moral quand on lui demande d'espionner ses collègues.

"C'est la première fois que je reçois un prix d'interprétation", a-t-il souligné, "c'est l'un des trois plus beaux jours de ma vie".

L'acteur a estimé que ce prix était "un acte politique".

"J'avais envie d'être lui, il me plaît. Je pense que le fait de l'interpréter ne m'a pas laissé indemne", avait-il confié auparavant à l'AFP.

Se glissant avec la même aisance dans la peau d'un brave type ordinaire ou d'un voyou, l'acteur de 55 ans, doté d'un caractère impétueux et inquiet, secoué de tics, qui donne l'impression d'entrer dans ses personnages avec un grand naturel, a été cinq fois nommé pour le César du meilleur acteur, sans jamais l'emporter.

Il a joué dans une soixantaine de films, oeuvres à résonance sociale, polars, comédies ou films d'auteurs, dirigé par Claude Lelouch, Diane Kurys Claire Denis, Benoît Jacquot, Pierre Jolivet, Philippe Lioret, Coline Serreau ou Alain Cavalier.

"Le confort m'angoisse... J'ai choisi l'intranquillité", disait-il récemment dans une interview à l'hebdomadaire Télérama.

Né le 15 juillet 1959, Vincent Lindon est le fils d'un industriel et neveu de l'éditeur Jérôme Lindon. Il débute dans le métier comme aide-costumier sur "Mon oncle d'Amérique" d'Alain Resnais et régisseur sur un spectacle de Coluche.

Après le cours Florent, il joue son premier rôle dans "Le Faucon" de Paul Boujenah, en 1983, mais sa première apparition marquante date de "37,2 le matin" de Jean-Jacques Beineix, deux ans plus tard.

On le voit ensuite dans "Quelques jours avec moi" de Claude Sautet, "Un homme amoureux" de Diane Kurys, avec qui il tournera "La Baule-les-Pins" ou dans "La crise" de Coline Serreau, qui le dirigera aussi dans "Chaos".

- 'Monstre d'acteur' -

Une romance avec Caroline de Monaco le propulse au début des années 1990 à la "une" de la presse people. A cette époque, les "à-côtés" du cinéma semblent l'attirer. Il sera proche de Claude Chirac, la fille du président Jacques Chirac, pendant des années, et soutient activement François Bayrou à l'élection présidentielle de 2007.

L'acteur français Vincent Lindon, prix d'interprétation masculine à Cannes, le 24 mai 2015 © VALERY HACHE AFP
L'acteur français Vincent Lindon, prix d'interprétation masculine à Cannes, le 24 mai 2015 © VALERY HACHE AFP

Puis c'est en 1994 "L'irrésolu" avec Sandrine Kiberlain, sa future compagne qui lui donnera une fille, Suzanne, en 1999. Le couple s'est depuis séparé.

Pudique et secret sur sa vie privée, l'acteur tourne dans "Paparazzi" d'Alain Berbérian, dans "Ma petite entreprise" (une de ses nominations aux César), de Pierre Jolivet, qu'il retrouvera dans "Fred", "Le Frère du guerrier" et "Filles uniques". Il a aussi joué dans "La Moustache" d'Emmanuel Carrère.

Il tourne en 2008 dans "Welcome" sur l'immigration clandestine, signé Philippe Lioret, qui le dirige à nouveau en 2011 dans "Toutes nos envies", sur la question du surendettement, des films dans une veine sociale à laquelle l'acteur est sensible.

"J'aime jouer dans ce type de films, mais pas uniquement. (...) C'est d'abord du cinéma que je vois", a-t-il dit à l'AFP.

Acteur fétiche de Stéphane Brizé, il a déjà joué deux fois avec lui, dans "Mademoiselle Chambon" (2009) et "Quelques heures de printemps" (2012).

"C'est un monstre d'acteur, quelqu'un qui questionne tout le temps l'instant sur un plateau, qui cherche tout le temps à savoir s'il y a du vrai", dit de lui Stéphane Brizé.

Dans "Pater" d'Alain Cavalier, film-ovni en compétition en 2011 au Festival de Cannes, Vincent Lindon joue au Premier ministre face au cinéaste qui interprète le président de la République, dans des échanges improvisés tournés chez l'un ou l'autre.

Récemment, il a campé le jardinier antisémite du "Journal d'une femme de chambre" de Benoît Jacquot, face à Léa Seydoux.

24/05/2015 20:50:45 - Paris (AFP) - Par Claude CASTERAN, Sophie LAUBIE - © 2015 AFP