Trois jours après sa violente double éruption, le volcan Calbuco montrait toujours samedi des signes d'instabilité, continuant de projeter ses cendres sur le sud du Chili, où près de 6000 habitants ont été évacués.

«Actuellement, je reste effrayée et je pense encore partir [des environs du volcan], mais à long terme, je retournerai sur ma terre», racontait Carolina Bayern, hébergée dans une école de Puerto Varas, ville distante de 40 kilomètres du Calbuco.

«Moi je n'ai pas peur du volcan», disait en revanche Raul Rangel, accueilli dans la même école. «J'éprouve du respect, je n'ai plus peur».

Mais les dégâts des deux éruptions survenues mercredi et jeudi sont très lourds: «ma maison s'est effondrée, elle est entièrement détruite, ma peine est immense», témoignait Raul.

La pluie de cendres qui est retombée sur le sud du Chili, une des régions les plus touristiques du pays, a déposé un tapis grisâtre et poussiéreux sur les routes et les maisons, faisant céder de nombreux toits sous son poids.

Sur les près de 6000 personnes évacuées aux alentours du volcan, situé sur la côte Pacifique à 1300 kilomètres au sud de Santiago, une centaine est logée dans des hébergements d'urgence. Les autres ont trouvé refuge chez de la famille ou des amis.

Alors que la zone reste en alerte rouge et sous contrôle de l'armée, le volcan, qui n'avait pas connu d'éruption en 54 ans, continuait samedi d'expulser des cendres.

À l'aube, de la lave incandescente a encore jailli du cratère, culminant à 2003 mètres d'altitude, ont constaté des journalistes de l'AFP.

«Les éruptions vont continuer»

«Le volcan reste instable, et les éruptions, principalement de cendres, vont continuer pour l'instant», selon le Service national de géologie et des mines (Sernageomin).

La «lave du volcan Calbuco est très visqueuse [...] c'est pourquoi vous ne verrez pas de rivières de lave», a précisé l'organisme sur Twitter.

«Mais on pourrait observer des coulées pyroclastiques», a-t-il ajouté, faisant référence à des mélanges de gaz volcaniques, de vapeur d'eau, de cendres et de débris dévalant les pentes du volcan à très haute température.

Les deux éruptions, si elles n'ont officiellement fait aucune victime, ont métamorphosé le paysage de la zone, habituellement très vert et désormais quasi lunaire, le tapis de cendres ayant recouvert les zones de cultures agricoles et d'élevage.

Au pied du massif, dans la petite bourgade de La Ensenada, la première à être évacuée, les autorités ont permis samedi à ses près de 1500 habitants de revenir quelques heures pour récupérer des affaires ou donner à manger à leurs animaux.

Selon le Bureau national des urgences (ONEMI), environ 300 agriculteurs sont affectés par l'éruption et 4000 ovins et bovins, ainsi que 350 animaux plus petits, ont été laissés sur place dans la précipitation.

Il s'agissait samedi de tenter de les évacuer, tout en continuant, masque sur le visage et pelle à la main, de dégager ces fines particules grisâtres encombrant les routes.

Aide d'urgence

«L'urgence principale est dans un rayon de 20 kilomètres [la zone d'exclusion autour du volcan, ndlr], où les habitants ont abandonné leurs champs, leurs biens, et même leurs animaux», a souligné le ministre de l'Agriculture, Carlos Furche, sur la radio Cooperativa.

«Il y a des champs qui vont être inutilisés pendant longtemps», car ils sont couverts de cendres, a-t-il ajouté.

Le gouvernement envisage de remettre une aide d'urgence aux agriculteurs les plus affectés.

Le nuage de cendres continuait par ailleurs samedi de se disperser au-delà des frontières, vers l'est, recouvrant la province argentine de Neuquen, en Patagonie, et allant jusqu'à la capitale, pourtant éloignée à 2000 kilomètres.

Si les particules restaient en altitude, ne menaçant donc pas la santé des habitants, elles ont toutefois provoqué l'annulation de plusieurs vols internationaux à l'aéroport de la capitale argentine, Buenos Aires.

À Santiago, les vols intérieurs étaient opérés normalement, mais certaines compagnies internationales ont dû annuler des vols en provenance d'Europe et des États-Unis.

Et alors que le nuage est parvenu jusqu'en Uruguay, l'aéroport de Montevideo a dû annuler trois vols. Les autorités ont appelé la population à se protéger avec des masques si les cendres, repérées à 6000 mètres d'altitude, retombaient au sol.

Le Chili, qui compte environ 90 volcans actifs, et dont Le Calbuco est considéré comme l'un des plus dangereux, vit sa deuxième éruption en quelques semaines, après celle en mars du volcan Villarrica (sud), qui avait entraîné l'évacuation de 3600 personnes.